Vous vous êtes emparé de ma raison;
“ Vous vous êtes emparé de ma raison, de ma vue, de mon ouïe,
de mon esprit, de mes entrailles, de tout moi-même.
Je me suis égaré dans votre extraordinaire beauté. Je ne sais
plus où est ma place dans l'océan de la passion.
Vous m'avez conseillé de cacher mon secret, mais le débor-
dement de mes larmes a tout dévoilé.
Lorsque ma patience est partie, lorsque ma résignation a pris
fin, lorsque j'ai cessé de pouvoir goûter dans mon lit
la douceur du sommeil,
je me suis présenté au cadi de l'amour et je lui ai dit:
mes amis m'ont traité avec rigueur et ils ont accusé
mon amour d'imposture.
(...) je viens déclarer mon insomnie, mon amour, mon chagrin,
ma tristesse, mon désir, mon amaigrissement, ma pâleur
et mes larmes.
S'il[s] me réclame[nt] les droits de leur amour, je suis le pauvre
qui n'a rien à lui ni sur lui. ”
Poème soufi de Sidi Abû Madyan.
Traduction d'Emile Dermenghem et Bachir Messikh (1938).